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Bonheur au travail : comment les PME peuvent-elles augmenter le bien-être et le bonheur au travail ?

Bien-être psychosocial Temps de lecture 5 minutes

Le bien-être au travail demande plus que de proposer un panier de fruits et des cours de yoga 

Les petites entreprises et les sociétés familiales doivent toucher à tout. En plus de bâtir une entreprise prospère, les entrepreneurs doivent également veiller au bien-être et au bonheur de leurs collaborateurs. Mais par où commencer, même si vous n’avez pas de département ou de directeur des ressources humaines ?  

Découvrez à quel point vos collaborateurs sont heureux au travail

Il y a quelques années, Vincent Meerschaert a découvert que certains de ses collaborateurs subissaient un trop grand stress. Il ne s’y attendait pas et cela l’a fait réfléchir au bien-être au sens large du terme.  « Lors d’un atelier, il est apparu que le niveau de stress était élevé au sein de notre entreprise. Ce n’était pas seulement lié au travail, mais également à nos activités afterwork que nous organisions sans obligation et avec les meilleures intentions. Certains collègues se sont sentis obligés d’y participer, alors qu’ils auraient préféré rentrer chez eux après le travail. Sans le savoir, nous leur avons mis une pression supplémentaire. »  

Vincent est directeur général chez Traject, une agence gantoise qui conseille les entreprises et les organisations en matière de mobilité durable. Il reconnaît que le rythme de travail est effréné. « Nos collaborateurs travaillent d’arrache-pied pour satisfaire les clients. Nous sommes une jeune entreprise comptant une quarantaine de collaborateurs, dont pas mal de starters. Ils sont tous motivés et ravis d’être impliqués dans de nombreux projets. Nous avons généralement plus de mal à les tempérer qu’à les motiver. » 

Le stress était élevé dans notre entreprise, à cause non seulement du travail, mais également de nos activités afterwork

Vincent Meerschaert

Il est important d’aimer son travail, mais si cela implique des sorties à répétition avec les collègues, la pression peut devenir trop forte. « L’atelier bien-être m’a ouvert les yeux », déclare Vincent. « J’ai soudain pris conscience que les personnes enthousiastes pouvaient elles aussi éprouver des difficultés. Et surtout : je n’ai pas su immédiatement comment gérer cette situation. » 

C’est un schéma reconnaissable, acquiesce la psychologue Elke Van Hoof, qui reçoit régulièrement dans son cabinet des chefs d’entreprise et des entrepreneurs désemparés qui admettent ne pas avoir remarqué les signaux de leurs travailleurs. « En réalité, il ne s’agit pas de signaux proprement dits, mais d’un changement de comportement. Lorsqu’un travailleur qui avait l’habitude de déjeuner avec ses collègues n’a soudain plus le temps de le faire, ou lorsqu’une personne qui trouvait facilement des solutions éprouve brusquement des difficultés à s’organiser, vous devez intervenir. » 

Le temps de récupération est essentiel pour le bonheur au travail

Mais comment faire ? Comment soutenir vos collaborateurs et augmenter leur bonheur au travail sans que votre entreprise en pâtisse ? « Investissez dans le temps de récupération », conseille Elke, qui définit un cadre pour un leadership responsable dans son livre Chief Happiness Officer.  

« Faites 30 minutes d’exercice modéré par jour. Passez des appels téléphoniques en vous promenant ou sortez le chien le soir. Dormez bien: mieux vous dormez, plus votre résilience est élevée. Et pour les employeurs : entretenez-vous régulièrement avec vos collaborateurs. Inspirez vos collègues en leur répétant la vision et la mission de l’entreprise. De cette manière, vous les incitez chaque fois à contribuer à la réalisation de votre projet. » 


speaking to the doctor


Le bien-être et le bonheur au travail sont un marathon, pas un sprint. Il s’agit de bien plus que d’une série d’initiatives isolées, comme par exemple offrir chaque semaine une corbeille de fruits frais ou des cours de yoga, déclare la consultante en bien-être Ann De Bisschop. Ses livres présentent une vision moderne et pratique de la manière d’assurer le bonheur des collaborateurs au travail. « Le bien-être est une politique qui s’articule autour de 7 piliers et qui n’est crédible que si tout le monde y adhère, y compris la direction. Il arrive encore trop souvent qu’un chef d’entreprise déclare que le bien-être est important, mais organise des réunions à 18 heures ou envoie des mails pendant le week-end. »  

Investissez dans votre politique de bien-être

Une politique de bien-être efficace ne doit pas nécessairement être coûteuse. Quelques interventions simples suffisent déjà. « Le plus important, c’est une nouvelle approche et de nouveaux accords », déclare Ann. 

« Misez sur la connexion, demandez à vos collaborateurs comment ils vont vraiment. Cela peut paraître idiot, mais évaluez le niveau de bonheur au travail tous les deux mois. Demandez à vos collaborateurs ce qui les motive et ce qui les démotive. Appliquez la méthode Start Stop Continue : par quoi devons-nous commencer, que ne devons-nous plus faire, et qu’est-ce qui vous plaît et que nous pouvons continuer ? » 


Misez sur la connexion, demandez à vos collaborateurs comment ils vont vraiment.

Ann De Bisschop

L’importance de l’engagement est difficile à surestimer, estime Ann. « Un responsable qui ne mange pas avec ses collègues ou qui organise des réunions pendant la pause déjeuner et prévoit des sandwiches : ce n’est pas comme ça qu’il faut procéder. Respectez les pauses et donnez vous-même l’exemple en faisant une pause avec vos collaborateurs. » 

Les travailleurs disent assez vite qu’ils souffrent de stress. Mais à quoi ressemble leur journée ? Ils enchaînent les réunions et parviennent à peine à s’occuper de leurs véritables tâches. Organisez au moins une « journée de travail continu » par semaine et ne programmez pas de réunions le matin. Entre 9 et 11 heures, nous avons encore le cerveau frais. Réservez cette période pour les tâches qui requièrent beaucoup d’attention. » 

Le sentiment d’appartenance augmente le bonheur au travail

L’humain d’abord, la fonction ensuite : tel est le principe directeur de Herman Verwimp, directeur du marketing et des ressources humaines de l’entreprise de construction limbourgeoise Gijbels Group. « Il s’agit de votre approche, de la manière dont vous traitez vos collaborateurs. Si vous considérez vos collaborateurs comme égaux et comme un capital indispensable, et si vous vous demandez de quelle manière vous pouvez entretenir une collaboration agréable, vous mettez toutes les chances de votre côté. » C’est une réflexion que tout le monde peut mener, que vous soyez gérant(e) d’une entreprise de construction ou d’une boulangerie.  

En tant qu’outsider, Gijbels, une PME comptant quelque 320 collaborateurs, a raflé le titre d’Ambassadeur RH devant certaines grandes entreprises en 2018. Selon Herman Verwimp, ce n’était pas le résultat d’une action particulière, mais le fruit d’années de bienveillance envers les collaborateurs.  


happy auto mechanic and his manager greeting


« Les travailleurs consacrent les meilleures années de leur vie à une entreprise. En tant que chef d’entreprise, vous devez leur en être reconnaissant. Vos collaborateurs méritent donc un bon leadership, un épanouissement personnel, une communication ouverte et honnête et de la flexibilité. Il est de notre responsabilité de veiller à ce que les travailleurs atteignent l’âge de la pension en bonne santé physique et mentale. » 

Il est essentiel que les collaborateurs se sentent valorisés. « Si vous dites à vos collaborateurs qu’ils peuvent arriver un peu plus tard au travail le 1er septembre afin de pouvoir accompagner leurs enfants à l’école, vous leur montrez que vous accordez de l’importance à qui ils sont et à ce dont ils ont besoin », indique Herman Verwimp. « Il en va de même pour la précarité énergétique. Nous avons demandé à nos chefs de service de se renseigner auprès des collaborateurs pour connaître leurs problèmes éventuels. Nous proposons un prêt sans intérêt à ceux qui ne peuvent plus payer leurs factures d’énergie. Vous faites ainsi passer le message : nous vous soutenons, nous vous aiderons à garder la tête hors de l’eau. » 

Il est de notre responsabilité de veiller à ce que les travailleurs atteignent l’âge de la pension en bonne santé physique et mentale.

Herman Verwimp

Gijbels ne fait pas de miracles, et Herman Verwimp n’est pas magicien. Sous sa direction, des collègues se sont retrouvés en burn-out. Dans de rares cas, ils n’ont jamais repris le travail. « Des événements sont survenus que je n’avais pas vus venir. Je me pose alors la question : Qu’aurais-je pu mieux faire ? 

La leçon apprise par Herman Verwimp : rares sont les problèmes que vous ne pouvez pas résoudre. Communiquez ouvertement, osez appeler les choses par leur nom et fixez des limites. « Comment se comporter avec les personnes de la communauté LGBTQIA+ ? Quelle position adopter en ce qui concerne le ramadan et les musulmans pratiquants ? Nous l’avons inscrit dans notre politique. » Améliorez votre communication, faites preuve de transparence. « Les travailleurs veulent savoir aujourd’hui si l’entreprise se porte bien. Ils veulent s’assurer qu’ils auront toujours du travail demain. Rassurez-les, donnez-leur des repères. Ils vous le rendront au centuple. » 

Un feed-back continu plutôt que des entretiens d’évaluation

Les solutions miracles n’existent pas, mais de petits changements peuvent aider à sortir d’une impasse et à développer le bonheur au travail. « En tant que chef d’entreprise, consacrez moins de temps aux questions opérationnelles et entretenez le contact avec vos collaborateurs », conseille Ann De Bisschop. « Demandez-leur comment ils vont vraiment, au lieu de leur demander rapidement si ça va lorsque vous les croisez dans les couloirs. Asseyez-vous et écoutez. Ce sera plus facile à faire dans les PME que dans les entreprises familiales, mais malgré tout : déléguez si nécessaire, afin de disposer du temps nécessaire pour parler avec vos collaborateurs. »  

Et, pour l’amour du ciel, arrêtez vos entretiens de fonctionnement, dit Ann en riant. « Oh mon Dieu, l’entretien d’évaluation annuel ! Cette époque est révolue. Privilégiez le feed forward au feed-back : dites ce que vous attendez de vos collaborateurs, fixez des objectifs. Un grand nombre d’entreprises utilisent un système de feed-back continu, qui s’inscrit dans le cadre du lâcher prise. » Le leadership repose sur la confiance, indique Ann. « Contrôler les travailleurs, c’est vraiment dépassé. » 

Un atelier a ouvert les yeux de Vincent Meerschaert, qui a décidé de changer de stratégie. En collaboration avec des experts externes, il a créé une culture d’entreprise axée sur le bien-être et le développement personnel des collaborateurs. « Nous avons appris à clarifier et à délimiter les responsabilités de chacun. Nos managers consacrent plus de la moitié de leur temps à leurs collaborateurs. Nous avons remplacé l’entretien de fonctionnement traditionnel par des réunions de feed-back, que nous organisons désormais plus régulièrement. Des entretiens personnels sont prévus toutes les 5 ou 6 semaines, idéalement dans le cadre de promenades. » 

Les avantages du bonheur au travail

La nouvelle approche se traduit par des collaborateurs plus heureux et une culture du travail plus détendue. « Notre approche axée sur les personnes est également un atout majeur pour attirer de nouveaux collaborateurs. Nous recrutons souvent au sein de notre réseau : par le bouche à oreille, les candidats entendent dire qu’il est agréable de travailler chez nous et demandent un entretien préliminaire. Au cours de cet entretien, nous précisons que, s’il est effectivement agréable de travailler chez nous, ce n’est pas non plus le Club Med. Nous nous considérons comme des professionnels sympas : des experts dans notre domaine, mais aussi des personnes avec qui il est agréable de collaborer. » 

Investir dans le bien-être et le bonheur est payant, affirme Ann De Bisschop. « Chaque euro que vous dépensez pour le bien-être de vos collaborateurs vous rapporte 2 à 14 fois votre mise, selon l’Organisation mondiale de la santé. Cela ne vous coûtera pas une fortune : en tant que directrice du bien-être, je disposais d’un budget de 75 euros par an et par travailleur. C’est moins cher que le buffet lors de la fête annuelle du personnel. »  

7 piliers d’une politique de bien-être efficace

  1. Créez une culture d’entreprise. « Vous n’êtes crédible comme chef d’entreprise que si vos valeurs et celles de votre entreprise concordent, surtout pour les jeunes. »
  2. Respectez l’ABC du bonheur au travail. « Misez sur l’autonomie, le besoin d’appartenance et les compétences. Plus besoin que le candidat et la fonction matchent à 100%.
  3. Faites attention à l’équilibre mental. « Augmentez la résilience de vos collaborateurs, soulignez l’importance des moments de concentration et des moments de repos. »
  4. Travaillez sur la santé physique. « Les personnes qui se sentent en forme sont plus productives. »
  5. Créez un sentiment d’appartenance.« Réalisez que les contacts sociaux sont importants, surtout maintenant que nous travaillons plus souvent à la maison. »
  6. Prévoyez des opportunités de croissance. « L’apprentissage permanent et le développement personnel vous rendent attrayant en tant qu’employeur. »
  7. Misez sur le leadership. « La relation avec les dirigeants détermine un tiers du risque de burn-out. »