Principe du transfert automatique
Lors d’un transfert conventionnel d’entreprise, le transfert de l’ensemble du personnel se produit automatiquement.
Il n’appartient pas aux cédant et cessionnaire d’opérer une sélection à ce sujet.
Selon la Cour de Justice, les contrats de travail sont transférés d’office et de plein droit du simple fait du transfert du cédant au cessionnaire, même si le cessionnaire et/ou le cédant ne le veulent pas[1] et que le cessionnaire refuse d’honorer ses obligations[2].
Formalités de clôture ?
Du fait du transfert automatique du personnel, les montants dus lors d'une rupture du contrat de travail, tel que le pécule de vacances de départ ou une prime de fin d'année proratisée, ne doivent pas être payés aux travailleurs transférés.
Dans la pratique cependant, il est conseillé au cédant et au cessionnaire de payer le pécule de sortie des travailleurs transférés lors du transfert, ainsi que la prime de fin d'année au prorata de leurs prestations de travail.
Situation individuelle des travailleurs
Les travailleurs n’ont d’autre choix que de se plier à la décision prise entre le cédant et le cessionnaire de transférer l’entreprise. Les travailleurs ne peuvent contester le transfert proprement dit. Les travailleurs ne peuvent en effet pas intervenir dans la convention entre ces 2 parties.
Ils peuvent, par contre, intervenir pour leur situation individuelle. Ils peuvent ainsi refuser que leur contrat de travail soit automatiquement transféré au cessionnaire, et donc rester au service du cédant.
Les cas de figure possibles sont les suivants :
- Le travailleur ne fait rien et accepte le transfert automatique de son contrat de travail au cessionnaire : la protection de la CCT 32bis s’applique.
- Le travailleur fait savoir au cédant qu'il ne souhaite pas être transféré au service du cessionnaire et donne sa démission au cédant : la protection de la CCT 32 bis ne s’applique pas.
- Le travailleur et le cédant ont conclu une convention avant le transfert par laquelle ils règlent le choix du travailleur[3] : le travailleur peut notamment choisir de ne pas être transféré et acquiert dès lors un droit à une indemnité de départ, ou son contrat de travail peut prévoir qu’en cas de transfert de l’entreprise, le travailleur ne sera pas transféré s’il s'y oppose[4]. Dans ce contexte, la CCT 32bis ne s’applique pas.
- Après la décision de transfert effectif, le travailleur fait savoir au cédant qu'il ne souhaite pas que son contrat de travail soit transféré au cessionnaire et refuse expressément son transfert au service du cessionnaire. La protection de la CCT 32bis ne s’applique pas. Le cédant doit alors garder le travailleur à son service :
- S’il ne le fait pas, il manque à ses obligations contractuelles[5] ;
- Si le cédant ne le fait pas parce qu'il ne peut plus fournir de travail au travailleur, sachant qu'il n’exerce plus d’activités en raison du transfert, il y a 3 possibilités : 1) l’employeur invoque la nullité du contrat de travail car il est devenu sans objet 2) il licencie le travailleur et lui paie une indemnité de rupture 3) le travailleur finit par accepter d’être transféré au service du cessionnaire. La protection de la CCT 32bis ne s’appliquera que dans ce dernier cas.
- Le travailleur refuse d’exécuter le travail au service du cessionnaire : cela signifie que le travailleur exprime la volonté de mettre fin au contrat de travail. Dans ce cas, le cessionnaire a intérêt à mettre le travailleur en demeure et à le sommer d’exécuter le travail. Le travailleur qui, en dépit de cette mise en demeure, s’obstine à refuser de travailler, peut être licencié par le cessionnaire parce qu'il a commis un acte équipollent à rupture. Le cessionnaire peut soit le licencier pour motif grave pour avoir refusé de travailler[6], soit demander la résolution judiciaire du contrat de travail devant le juge du travail.
L’intention réelle du travailleur prime sur l’intention exprimée à transférer oui ou non son contrat de travail. L’acceptation est une appréciation de fait. Ainsi la Cour de Travail d’Anvers[7] a décidé que :
- Le refus de conclure un nouveau contrat de travail du fait de la perte de l’ancienneté acquise qui y serait liée, n’implique pas que le travailleur a refusé le transfert lui-même
- La poursuite ininterrompue des prestations de travail dans le cadre des activités entre-temps reprises par le cessionnaire, signifie que le travailleur a accepté le transfert
[1] Voir arrêt de la CJCE 25 JUILLET 1991 C-362/89 D’Urso Jur 1991 I -4105.
[2] Voir arrêt CJCE 14 NOVEMBRE 1996 C-305/94 Rotsart de Hertaing, Jur.1996,5937.
[3] C. trav. Bruxelles 11 juin 2004, Chron. D.S. 2005,p.318
[4] C. trav. Bruxelles 11 juin 2004, Chron. D.S. 2005, p.318
[5] C. trav. Gand 25 mars 2005, Chron. D.S. 2005,323
[6] Attention, en cas de litige, le dernier mot revient au juge. Le tribunal peut juger qu’aucune faute grave n’a été commise par le travailleur.
[7] Voir l’arrêt de la Cour du travail d’Anvers du 4 décembre 2002, J.T.T.2004, 463.