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Modification de la loi Genre : le "sexe" n’est plus le seul critère protégé

La loi du 15 décembre 2022 apporte diverses modifications à la "loi Genre". Le critère de base "sexe" est remplacé par onze critères protégés, parmi lesquels les "responsabilités familiales".

20 janvier 2023

Désormais, cette loi tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes protège aussi les travailleurs qui demandent un régime de travai plus flexible au sens de la CCT n° 162. Elle est entrée en vigueur le 19 janvier 2023.

Le "sexe" n’est plus un critère de base

Le point positif de l’ancienne loi Genre est qu’elle offrait un cadre pour lutter contre la discrimination sur la base du critère "sexe". Toutefois, la formulation de cette loi a également engendré différents problèmes d’interprétation. Dans la pratique, il n’était pas toujours évident de déterminer si une situation constituait un acte de discrimination interdit ou pas.

La loi Genre modifiée abandonne donc le "sexe" comme point de départ central et dresse désormais une liste élargie de onze critères protégés sur lesquels se fonde l’interdiction de discrimination :

  • Le sexe 
  • La grossesse 
  • La procréation médicalement assistée 
  • L’accouchement 
  • L’allaitement 
  • La maternité 
  • Les responsabilités familiales 
  • L’identité de genre 
  • L’expression de genre 
  • Les caractéristiques sexuelles 
  • Le changement de sexe

Nouveau critère "responsabilités familiales"

Que recouvre précisément le nouveau critère "responsabilités familiales" ? L’exposé des motifs de la loi Genre définit ce critère comme suit :

" La situation qui se présente lorsque des personnes ont des responsabilités à l’égard des enfants à charge ou d’enfants domiciliés avec elles, ou ont des proches qui ont besoin d’une forme d’assistance ou de soin de type social, familial ou émotionnel. […] Une personne peut prendre un congé à cette fin et doit être protégée de tout traitement défavorable en raison de ces soins ou de cette aide".

Quels congés recouvre la notion des responsabiltiés familiales, et quels congés n'en font pas partie?

La loi protège donc toute une série de congés. Pensons par exemple au congé d’adoption, au congé parental, au congé d’aidant ou au congé pour raisons impérieuses. De plus, le libellé de la loi ci-dessus protège également les demandes de régimes de travail flexibles (voyez plus loin).

Les critères de “maternité”, de “grossesse”, d’”accouchement” et d’”allaitement” ont en revanche été explicitement exclus de la notion générale de “responsabilités familiales” car, dans leur signification juridique dans la Loi Genre, ces critères sont inextricablement liés à une condition biologique. Ceci contrairement aux congés pris pour s’occuper d’enfants ou prêter une quelconque assistance, qui relèvent eux de la notion générique de “responsabilités familiales”.

Nouveaux droits explicites

La loi Genre stipule désormais que le travailleur a le droit de retrouver la même fonction à l’issue d’un congé de maternité, d’un congé de naissance, d’un congé d’adoption ou d’un autre congé dans le cadre des responsabilités familiales. En cas d’impossibilité, l’employeur doit lui attribuer une fonction équivalente ou similaire, qui est conforme à son contrat de travail ou à sa relation de travail.

Le travailleur a également le droit de bénéficier de toute amélioration des conditions de travail à laquelle il aurait eu droit durant son absence dans le cadre des responsabilités familiales.

Exemple

Pendant le congé de maternité d’Anne, son employeur a octroyé un jour de congé supplémentaire à tous les collaborateurs avec cinq années d’ancienneté. Si Anne satisfait à cette condition, elle a également droit à ce jour de congé supplémentaire.

Par ailleurs, le travailleur a le droit de bénéficier de tous les droits acquis ou en cours d’acquisition durant la prise d’un congé de maternité, d’un congé de naissance, d’un congé d’adoption ou d’un autre congé dans le cadre des responsabilités familiales.

Exemple

L’employeur d’Anne octroie au personnel une prime exceptionnelle liée aux prestations effectives réalisées au cours du deuxième semestre de 2022. Anne a pris son congé de maternité pendant cette période. Anne sera également éligible pour cette prime, car elle ne peut être victime d’un traitement défavorable en raison de la prise de son congé de maternité.

Dommages et intérêts en plus de l’indemnité de protection en vigueur

Les travailleurs qui s’estiment victimes d’une infraction aux droits susnommés peuvent réclamer une indemnité forfaitaire de six mois de rémunération brute.

Les dommages et intérêts forfaitaires peuvent être cumulés avec les indemnités de protection versées suite à la rupture d’une relation de travail, sauf disposition expresse contraire en vertu d’une loi.

Exemple

Après son congé de maternité, Anne n’a pas pu retrouver son ancienne fonction et son employeur ne lui a pas proposé de fonction similaire. Elle a en outre été licenciée pendant la période de protection liée à son congé de maternité. Son employeur ne peut pas prouver que ce licenciement n’est pas en lien avec ce congé.

Anne pourra non seulement faire valoir son droit à des dommages et intérêts correspondant à six mois de rémunération brute (parce qu’elle n’a pas pu retrouver son ancienne fonction ou une fonction similaire), mais aussi son droit à une indemnité de protection de six mois de rémunération brute (parce qu’elle a été licenciée sans motif valable).

Vous trouvez un aperçu des principales mesures de protection contre le licenciement sous le thème Licenciement et fin du contrat de travail > Protection contre le licenciement et le traitement défavorable > Protection contre le licenciement.

Les régimes de travail flexibles (CCT n° 162) bénéficient désormais d’une protection renforcée

La CCT n° 162 a introduit le droit pour les travailleurs de solliciter un régime de travail flexible pour prendre de soin de leur enfant, pour prodiguer des soins personnels ou une aide personnelle à un membre de la famille qui a besoin d’une assistance ou de soins importants pour une raison médicale grave.

Pour protéger les travailleurs qui font usage de ce droit contre les représailles, la CCT définit quelques garanties. Elle prévoit ainsi une protection contre des mesures défavorables et le licenciement qui peut impliquer la condamnation de l’employeur à payer une indemnité de protection.

Le texte de la CCT stipule expressément qu’il est interdit de cumuler la protection de la CCT n° 162 avec d’autres indemnités dans le cadre de la résiliation du contrat de travail par l’employeur, ou avec les dommages et intérêts forfaitaires de la loi Genre en cas de discrimination fondée sur la "responsabilité familiale". Les organisations patronales avaient dès lors demandé que l’interdiction de cumul soit reprise dans la modification de la loi Genre. Le législateur n’a toutefois pas tenu compte de cette demande. La loi Genre modifiée stipule à répsent que seule une autre loi peut imposer une interdiction de cumul.

Étant donné qu’une loi (le cas échéant la loi Genre) est hiérarchiquement supérieure à une CCT, vous pouvez désormais aussi cumuler des dommages et intérêts forfaitaires avec toutes les indemnités de protection à la suite d’une résiliation du contrat de travail (y compris l’indemnité de protection en cas de régimes de travail flexibles sur la base de la CCT n° 162).

L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes

Enfin, la compétence de l’Institut pour résoudre les litiges juridiques est modifiée.

L’Institut est compétent pour agir en justice dans les litiges en lien avec sa mission légale. Par le passé, l’intervention de l’Institut était seulement possible au nom d’une victime identifiée et uniquement recevable moyennant l’accord de cette victime. La nouvelle loi Genre permet dorénavant aussi que l’Institut intente une action en son nom propre, sans le consentement d'une victime identifiée.

Deux lois contre la discrimination continuent de coexister

Même après sa modification, la loi Genre continue d’exister en tant que loi distincte parallèlement à la loi anti-discrimination. À l’heure actuelle, deux lois importantes pour lutter contre la discrimination coexistent donc toujours :

  • La loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, loi anti-discrimination 2007 en abrégé
  • La loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes, loi Genre 2007 en abrégé. La loi Genre vise à créer un cadre général pour lutter contre la discrimination sur la base du sexe. Elle décrit les règles en matière d’égalité de traitement des hommes et des femmes selon un schéma identique à celui de la loi anti-discrimination 2007

Dans un souci d’exhaustivité, nous mentionnons également la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie.

Que fait Securex ?

Vous avez des questions en rapport avec un travailleur potentiellement protégé par la loi Genre ? Demandez conseil à votre Securex Legal Advisor en lui adressant un e-mail à l’adresse suivante : myHR@securex.be.

Source

  • Loi du 15 novembre 2022 portant modification de la loi Genre et de la loi portant création de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, Moniteur belge du 9 janvier 2023 (ainsi que l’exposé des motifs de cette loi)

 

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